Les conséquences environnementales de l’abominable guerre au Soudan

                                                              darfour les conséquences environementales

darfour les conséquences environementales

2 générations privées d’éducation.

La guerre au Soudan est l’une des plus longues et meurtrières que l’Afrique ait connue. Le coût économique excédant de loin ce que le pays peut assumer, les coûts humains eux sont inestimables. La guerre du soudan serait l’une des plus meurtrières de toutes les guerres qui ont eu lieu après la seconde guerre mondiale. 4.1 Millions de déplacées selon l’ONU ; des populations paupérisées dans des zones urbaines, une destruction d’infrastructures, un arrêt de l’Agriculture dans un pays au climat déjà aride. Il est important de mentionner qu’au Soudan, l’après-guerre dénombre 250.000 décès d’enfants dû aux maladies et aux famines ; conséquences directes de la guerre. Il nous sera intéressant d’observer et étudier l’aspect environnemental des conséquences d’une guerre dont les origines sont aussi nombreuses et diverses que contradictoires.

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Alors que le Soudan sortait en 1982 d’une guerre qui opposait la rébellion sudiste de John Garang et le pouvoir central de Khartoum, une guerre éclatait de nouveau. A l’origine, des problèmes géopolitiques complexes et à la fois contradictoires dans lesquels nous ne nous verserons pas ici. Car une fois déclenchée, il est difficile de retrouver avec précision les origines d’une guerre, compte tenu de la logique destructrice de celle-ci. Il est impossible cependant de négliger l’aspect environnemental dans pareil conflit1.

« L’environnement présente en effet des enjeux et de destruction et de préservation intrinsèquement liés au potentiel de survie des belligérants et de développement économique. Aussi, les conséquences sur l’environnement des conflits armés, souvent secondaires par rapport à l’urgence de paix et de sauvegarde des vies humaines, n’en demeurent pas moins systématiques, néfastes et parfois irréversibles (Naaman, 2008). » (Extrait de « les évaluations des impacts sur l’environnement en période de conflits armés » GUILLAUME BUSSET (2009).2)

Il faut dire que le Soudan se situe déjà dans le Sahel, une région qui selon le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) est l’une des plus menacées au monde par la sècheresse. Cette sécheresse fut partiellement à l’origine d’une aggravation des causes de conflits. On a assisté finalement à une spirale négative désastreuse : guerre-  modifications environnementales – guerre modifications environnementales…

Il n’existe pas de bilan écologique précis sur la guerre au Soudan. Les seules données connues sont des constatations faites pendant et après les conflits.

darfour
sécheresse – déboisement au rendez-vous

On a observé un accroissement de la longueur des cycles de sécheresse, une augmentation de la désertification et une expansion du Sahara dans le sud. Depuis 1930, on estime de 100km à 200km, le déplacement de la limite entre la zone désertique et semi désertique.3 Le taux de déforestation général depuis la guerre est estimé à 0,84%.

Ces guerres ont entraîné avec elles des déplacements de populations, créant de fait, des compétitions pour les ressources en pénuries, de quoi engendrer de nouveaux conflits. La désertification et la sécheresse ont modifié les mouvements de migration des tribus de pasteurs vers de nouvelles régions4. Le bétail déplacé dans les zones géographiquement viables mais limitées était à l’origine du surpâturage qui lui-même a contribué à la déforestation. Cette déforestation est à l’origine des crues du Nil bleu, sources d’inondations pendant les saisons pluvieuses. Ces crues associées à la dégradation du bassin versant ont été à l’origine de graves érosions, notamment dans la bande riveraine fertile du Nil.

Au Soudan, l’activité économique principale fut l’agriculture. Pourtant, la destruction des villages et des espaces cultivables par la politique de la terre brûlée a privé des millions d’individus des moyens de survie, compromettant pour longtemps des actions de renouvellement des terres fertiles. En effet, en raison de l’instabilité engendrée par la guerre, on a assisté à une inadéquation des régimes fonciers ruraux. Les paysans perdent toute motivation à investir dans les ressources naturelles et à les protéger. L’agriculture anarchique a contribué au déboisement à grande échelle et pas seulement ; à la dégradation des sols, l’apparition des espèces envahissantes et une perte de la diversité biologique.

Les réserves naturelles locales ont été épuisées. Des espèces sauvages ont disparu ; une chasse incontrôlée et non durable a décimé des populations de faune sauvage tel que les buffles, girafes…

Les activités champêtres en berne, la forte mortalité du bétail a eu un impact considérable sur l’élevage, engendrant une baisse de production et une insécurité alimentaire.

Les camps de réfugiés, concentrés dans des zones réduites et écologiquement fragiles ont eu pour conséquence d’augmenter la pression humaine sur les écosystèmes et accélérer la dégradation de l’environnement5. On y a assisté à une véritable pollution des eaux. Dans ces camps de réfugiés, l’utilisation grandissante du bois pour la fabrication des briques fut une nouvelle source de revenus de subsistance aux conséquences néfastes pour les forêts (déforestation).6

La guerre du Soudan est responsable de la mort de 2,5 millions de personnes, 4 millions de déplacés et 2 générations privées d’éducation7. Analyser et comprendre l’impact environnementale de la guerre dans cette région, est d’un intérêt certain dans la mesure où ce pays, le plus grand d’Afrique en superficie est immensément riche en ressources naturelles, (hydrauliques, énergétiques, minérales) et doté d’une grande diversité géologique et climatique, allant du désert à la forêt équatoriale.

shéma illustratif des conséquences environnementales de la guerre au soudan. Par Nel Tsopo Nziemi UCL

Boîte 2 : Pertes humaines

Les pertes humaines sont évaluées par le taux de mortalité brute. Ce taux indique le nombre de décès au cours de l’année pour 1000 personnes. On peut également calculer le taux d’augmentation naturelle de la population en soustrayant du taux brute de mortalité, le taux brute de natalité.1

Boîte 6 : Déplacement de la population

Le taux moyen de migration interne net d’une zone géographique permet d’évaluer l’évolution de la population imputable aux mouvements migratoires entre cette zone et les autres parties du territoire national

un camps de réfugiés
un camps de réfugiés déplacés

Boîte 8 : Pression humaine sur les écosystèmes

L’indice global « l’empreinte écologique » permet d’estimer la pression de l’homme sur les écosystèmes, exprimé en unité de surfaces. Chaque unité correspond au nombre d’hectares de terres biologiquement productives nécessaires pour produire les aliments et le bois que produit les habitants ; l’équipement qu’ils utilisent et pour absorber le CO2 produit par les combustibles fossiles. Cette empreinte tient ainsi compte de l’impact total des habitants sur l’environnement. Il est égal à la différence entre les entrées et les sorties de la zone considérée liés à des mouvements internes, rapportée à la population moyenne de la zone.2

Boîte 9 : Chute de la biodiversité

On mesure l’évolution du nombre d’espèces par km carré ; le nombre d’espèces en danger d’extinction dans une région ; le nombre d’espèces disparues dans une région ; l’importance des plantations industrielles…

Boîte 10: Surpâturage et déforestation

Le surpâturage est souvent source de déforestation. On définit la déforestation comme étant le changement de superficie de forêt au cours d’une période donnée. On parle d’un taux de déforestation annuel exprimé en pourcentage. Ou d’un pourcentage de perte de forêt primaire.3

Pertes humaines au Soudan

Au soudan, on dénombre environ 34.000 morts de combattants depuis 1983. Quant aux civils, la variété et la complexité des origines de leurs morts rend l’estimation très approximative, même si on parle de 250.000 à 350.000 tués.4 Il est en effet difficile de déterminer si les morts civils sont directement ou indirectement liés à la guerre. De plus, les conséquences environnementales de la guerre s’étendant sur plusieurs années après celle-ci ; doit-on comptabiliser des morts de suite de ces lointaines conséquences ? Le taux de mortalité observé au soudan depuis 1960 est en constante décroissance. Il est partit de 18,86% en 1983 à 8,36 en 2013.5 Des chiffres qui peuvent ne pas traduire l’ampleur d’une guerre si elle est localisée spécifiquement dans une partie du pays étudié. Les chiffres positifs des autres parties du pays peuvent adoucir le taux moyen.

Déplacement de la population

Le Soudan est le pays qui a connu le plus de déplacés dans le monde. Environ 2,5 millions de déplacés internes et 2 millions de réfugiés internationaux. Des données encore faciles d’accès grâce au PNUE (programme des Nations Unies pour l’Environnement) qui a mené une étude d’évaluation environnementale post-conflit.6

Surpâturage et déforestation

Au Soudan, le surpâturage dû à la forte concentration de la population dans les camps de réfugiés, a fortement contribué à la déforestation. Selon le rapport du PNUE, la limite entre la zone désertique et semi-désertique s’est déplacée de 50 à 20 km vers le sud depuis les premiers relevés de précipitations et de végétation effectués en 1930. Entre 1990 et 2005, le Soudan a perdu 8835.000 Ha, soit 11,6% de sa forêt.7

On peut déplorer dans ces chiffres le manque de récurrence dans les mesures. Difficile de connaitre la proportion exacte de l’impact des guerres sur la déforestation et comment discerner cet impact des causes « naturelles » comme le réchauffement climatique ?

Extrait d’un Cas d’Etude UCL (Université Catholique de Louvain) – Sciences de la population et du développement – Par Nel Nziemi Tsopo

Demandez l’étude entière

Bibliographie :

1 Division des Nations Unies pour la population. 2009. World Population Prospects: The 2008 Révision (Perspectives relatives à la population mondiale : révision de 2008) http://donnees.banquemondiale.org/indicateur/SP.DYN.CDRT.IN

2 INSEE – Institut nationale de la statistique et des études économiques (http://www.insee.fr/fr/methodes/default.asp?page=definitions/taux-migration-interne.htm)

3 S. Henry « INDICATEURS ET SOURCES » Université Catholique de Louvain La Neuve

4 SALAH AL-DIN AL SHAZALI, Université de Khartoum ; Égypte (2008) « Les crises soudanaises des années 80 », MONDE ARABE, Première série, 15-16 | 1993.p. 153-174.

5 Statistiques PERSPECTIVES MONDE – UNIVERSITE DE SHERBROOK – http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMTendanceStatPays?codeTheme=1&codeStat=SP.DYN.CDRT.IN&codePays=SDN&codeTheme2=1&codeStat2=x&codePays2=SDN&langue=fr

SCOTT EDWARDS, Spécialiste du Soudan auprès d’Amnesty International USA (2005) «Darfour, l’effondrement social – Etude de cas», FORCED MIGRATION REVIEW.(rmf 31).

GUILLAUME BUSSET (2009) « les évaluations des impacts sur l’environnement en période de conflits armés » Essai – UNIVERSITE DE SHERBRROOK

– SOUDAN : « Evaluation environnementale post-conflit » (2006) PNUE (programme des nations unies pour l’environnement) – http://postconflict.unep.ch/publications/UNEP_Sudan_synthesis_F.pdf

5 AL-HAMNDOU DORSOUMA – MICHEL ANDRE BOUCHARD (2013) ; « Enjeux environnementaux et humanitaires du conflit armé du Darfour », SECRETARIAT INTERNATIONAL FRANCOPHONE POUR L’EVALUATION ENVIRONNEMENTALE

7 ZYGMUNT L. OSTROWSKI (2001) «  Soudan, coulisses d’une guerre oubliée » – Collection mémoire africaine aux éditions Harmattan

Salah al-Din al-Shazali, « Le coût humain et social de la guerre civile », Université de Kartoum ; Égypte/Monde arabe, Première série, 15-16 | 1993, mis en ligne le 07 juillet 2008.

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