Avec son nouveau single « Mhlaba », le producteur sud-africain AJourneyOfMilez signe une échappée sonore aussi nostalgique que spirituelle. Un premier titre sur le label Paradise Sound System, où l’Afro House flirte avec le conte d’enfance et l’héritage musical du continent.
Le rêve comme refuge
En isiZulu, le refrain du morceau – « Mhlaba! ungangivusi ngisaphupha » – se traduit par : « Monde ! Ne me réveille pas, je suis encore en train de rêver ». Une incantation lancée comme une bouteille à la mer dans un océan de beats profonds et de nappes atmosphériques. Ce chant, porté par la voix poignante de Mbalizethu, nous invite à reconsidérer le monde à travers les yeux d’un enfant : celui où l’imagination déjoue les contraintes du réel, où les super-héros sillonnent les galaxies, et où la douleur n’a pas encore appris à parler.
« Mhlaba » (le monde, en zoulou) n’est pas qu’un simple morceau d’Afro House : c’est une tentative d’évasion collective, une réponse musicale à un monde qui tourne un peu trop vite.
Une trajectoire marquée par les grands
Derrière AJourneyOfMilez, on trouve Nkosinathi Thabani Ndlovu, un nom encore discret mais qui murmure déjà aux oreilles averties. Né dans une Afrique du Sud bercée autant par les tambours ancestraux que par la house électronique, il revendique l’influence de figures tutélaires telles que Black Coffee, Culoe De Song ou DJ Fresh – véritables architectes du son panafricain moderne. Mais ses premières émotions musicales, il les doit aux géants que sont Salif Keita, Oliver Mtukudzi ou encore Hugh Masekela. Des artistes pour qui la musique n’était pas un simple divertissement, mais un vecteur d’histoire, de mémoire et de résistance.
De l’Afrique à Amsterdam
AJourneyOfMilez n’en est pas à son coup d’essai. Repéré par le label Offering Recordings du producteur Boddhi Satva, il se fait remarquer dès 2016 avec le morceau « THUMELA » (feat. Alexander James), inclus dans la compilation officielle du prestigieux Amsterdam Dance Event. Il enchaîne avec des titres comme « NOTICE YOU » (feat. ZE3) et « QUESTIONS » avec le chanteur Chappell, remixé par GUMS et Freddy Da Stupid, affirmant au passage une patte narrative qui distingue ses productions dans la marée des releases électroniques.
Un conteur électronique
Ce qui fait la singularité d’AJourneyOfMilez, c’est sa capacité à raconter des histoires. Chaque morceau agit comme un chapitre sonore, sculpté à la fois par les souvenirs d’enfance et les aspirations d’adulte. Son nom d’artiste – littéralement « Un voyage de kilomètres » – n’est pas une coquetterie : c’est un manifeste. Celui d’un producteur-pèlerin, traversant les territoires de l’âme et du dancefloor avec la même intensité.
Avec « Mhlaba », il signe une escale poignante dans un monde où le rêve tient tête à la réalité. Un morceau à écouter les yeux fermés, mais les pieds ancrés dans le sol.