Entretien avec Princesse Lover
La diva antillaise Princesse Lover, célèbre grâce à son tube zouk love « tu es mon soleil », se présente sous toutes ses coutures grâce à une interview qu’elle a eu le plaisir d’accorder à brukmer.be. Humilité, profondeur, amour et humour animent son quotidien et ses compositions en sont l’image.
Brukmer.be : Tout va bien mon soleil ?
Princesse Lover : Mon soleil va bien merci
Selon la légende, à 3 ans, tu faisais déjà des jingles pour la radio. C’est vrai ça ?
Mes frères travaillaient déjà pour des radios et quand ils faisaient leurs enregistrements, j’étais toujours présente et à force de les côtoyer, ils se sont dit pourquoi pas, j’avais une voix qu’ils aimaient, je faisais des jingles en parlant ou en chantant.
Très tôt tu fonde un groupe, les « Fatal MC »
C’était un groupe de reggae dance soul, même si moi j’étais dans un style lover et j’apportais ce côté-là au groupe, je chantais toutes les mélodies.
Ce bout de chemin t’a mené jusque « mon soleil » et contrairement à ce que l’on croit, c’est une chanson dédiée au départ à ton neveu.
C’est vrai que l’expression mon soleil avait été choisi pour désigner mon neveu, car il a été le premier petit enfant de la famille. Quand il est arrivé, c’est vrai que c’était l’enfant de ma sœur, mais il reste notre bout d’choux à tous, il a illuminé notre vie. L’âme sœur c’est comme ce soleil, on s’en plein quand il est là, mais quand il y a quelques gouttes de pluies, on le réclame. Parfois il nous brûle mais on se rend compte que les chagrins d’amour nous font mûrir et c’est le côté positif à en tirer d’un échec amoureux.
Tu crois vraiment en l’amour ? ça existe encore ?
Oui j’y crois ; l’amour existe, on a chacun d’entre nous une âme sœur, mais il faut pouvoir tomber dessus.
On peut passer à côté toute la vie ?
Oui on peut passer à côté. C’est un cercle vicieux, l’être humain a tendance à se dire qu’il est malheureux parce qu’on l’a fait souffrir mais, quand on est intéressé par quelqu’un, on devient aveugle et on oublie toutes les personnes qui pourraient avoir un regard d’amour envers nous. On est malheureux par certaines réactions de la personne qui nous intéresse, mais on oublie qu’on fait pareil à d’autres.
Est-ce que tu connais l’amour en ce moment ?
Je ne pense pas avoir trouvé réellement l’homme de ma vie, je connais un amour différent. J’étais persuadé il y a un an et demi l’avoir trouvé, j’ai pensé que c’était la personne que j’avais le plus aimé. Ce pendant, mon avant dernier amour, je l’avais pensé aussi, on avait fait tellement de projets et finalement j’ai aimé un autre beaucoup plus profondément que lui. Le vécu, l’âge, la maturité face à la situation, font aimer différemment et je suis contente de ne pas être tombé directement dans ce vrai amour même si c’est vrai que l’innocence apporte une certaine magie ; mais j’ai envie avec le savoir que m’offre l’âge, de vivre un amour réfléchit, et de savourer chaque seconde car on a eu le temps de se rendre compte qu’on n’est pas grand-chose sur terre.
Quand on se rend compte de ce que c’est de perdre quelqu’un qu’on aime, on pourrait savourer un lieu, une anecdote, juste un regard, même une dispute. Aujourd’hui j’ai un autre regard, chaque seconde partagée avec des gens, avec une communauté, c’est géniale.
Tu as tout de même une philosophie de vie très mature pour ton âge, on dirait une sage qui parle.
Ma seule façon de me dévergonder est de regarder un peu la vie des autres, car j’ai choisi un métier qui est plus celui des autres que le mien, parce que je m’offre complètement aux gens, et quand je rentre à la maison il ne me reste plus que mon enveloppe corporelle et quelques souvenirs qui peuvent me permettre d’exister d’une certaine manière et qui m’autorisent à aimer, à être heureuse à travers le bonheur des autres.
Tu penses que ton métier est compatible a une vie amoureuse ?
Pour l’instant c’est incompatible, car je ne suis pas tombé sur l’âme sœur, mais le jour où ce sera le cas, rien ne sera plus un inconvénient.
Quels sont tes rapports avec l’Afrique ?
Oh ! je ne trouverai jamais de qualificatif pour exprimer ce qui se passe. C’est une espèce de pseudo magie et …j’avoue que Prodicia m’avait prévenu à ma première grande interview à Rfi. « La première fois que tu mettras tes pieds en Afrique, tu te rendras compte de ce que tu représente » me disait-il. là bas j’ai pu comprendre d’où je viens et je me suis rendu compte de pourquoi quand on se balade à paris, nos sœurs africaines nous appellent « cousine » pendant que nous on se sent quand même un peu différente. L’Afrique m’apprend énormément, je m’y sens chez moi.
C’est ce qui t’a poussé à faire un featuring avec Mokobé et fally ?
C’est un peu celà, et c’est vrai que dans le premier album j’ai fait une sorte de Ndombolo à l’antillaise. J’ai donc eu la chance d’avoir la disponibilité de notre malien le plus ivoirien du monde c’est-à-dire Mokobé et de Monsieur fally Ipupa qui sort de cette grande école de la musique Congolaise.
Mokobé je le connaissais déjà, mais avec Fally, on s’est connu et on vit des liens sacrés, on comprend les rythmes, j’ai encore du mal avec le Mbala, très compliqué, car ça se multiplie, ça se décuple. C’est vrai qu’on traverse les océans, mais la musique africaine a beaucoup d’influence aux Antilles. Le monde africain est un tout, la musique, la gastronomie, les expressions, j’adore ces expressions de boucantiers avec tout le concept. C’est hilarant et en même temps ça leur va tellement bien car c’est un travail d’authenticité de la personnalité qui est extraordinaire.
Quels sont les artistes africains qui t’ont marqués ?
Awilo, Babamal, Youssoun Ndour pour qui j’ai fait la première partie de son spectacle à la Martinique et qui m’a offert l’honneur de faire des cœurs avec Viviane Ndour à l’époque.
Quel ressenti quand on t’annonce qu’il y a des gens complètement fous de ta musique dans des pays africains où tu n’es jamais allé ?
En même temps je connais le fonctionnement en Afrique, en même temps je reste une grande fan des géants de la musique zouk qui m’ont énormément parlé d’Afrique car ils ont connu le succès la bas, en l’occurrence, Jocelyne Beroard, Harry Diboula ; puis arrivé en France j’ai eu des arguments comme ceux de Phil Controle, Jacky Rapon (lire Jacky Rapon face à brukmer). Parfois on voit comment les choses peuvent se passer pour les autres, mais on ne sait pas que cela pourrait nous arriver. La chanson « mon soleil » est comme une carte postale pour Princesse Lover en Afrique et je ne l’aurais jamais pensé, vu la facilité côté composition.
Je me suis souvent senti extraterrestre face à certains comportements dans ma propre communauté ou dans ma vie française. On refuse d’ouvrir la porte quand on sonne à la porte de peur de partager son repas. En Afrique, quand on a une assiette on peut la partager en 30 portions et personne ne vole un grain de riz à l’autre. J’ai trouvé cela extraordinaire, on m’a dit « téranga » on m’a dit bienvenue et même si on ne me l’avait pas dit, je l’avais ressenti à travers les regards.
A quand le Cameroun ?
(Éclats de rire) C’est vrai qu’avec toutes les propositions et tous les arguments extraordinaires que maman Annie Anzouer et toi ont pu donner de ce pays, ça donne envie. Il y a des choses qui sont entrain de se ficeler.
Des relations étroites avec Annie Anzouer ?
J’ai eu une chance extraordinaire de l’avoir eu sur mon premier album (mon soleil) en plus elle a vraiment le rôle de la maman. Dans la chanson je lui demande de me faire confiance en la rassurant que mon modèle reste elle ma maman.
« Prends-moi la main » ce titre t’a fait grandir
Oui mon père est parti un an et demi après mon frère qui lui est parti la veille de mon anniversaire. Après le départ de mon frère, mon père n’a pas supporté et chaque larme voulait dire quelque chose. C’était à une époque où mon père était adjoint au mère à la Martinique, il ne demandait rien, il donnait tout l’amour. J’ai compris qu’à force de travailler pour donner à manger à ses enfants, il déplorait de ne pas avoir eu le temps de savoir qui étaient ses enfants. Cette chanson raconte aussi l’état d’esprit des gens qui n’ont jamais perdu un membre de leur famille ; ils ne sont pas forcément conscient de cela et se disent que ça n’arrive qu’aux autres. Quand cela nous arrive, on a l’impression de tomber d’un gratte ciel et on se rend compte qu’on n’est pas grand chose.
Tout ce que je peux lui demander c’est de me donner la main et j’avoue que depuis qu’il est parti, je ne l’ai jamais senti aussi présent.
Merci Princesse Lover, brukmer te souhaite beaucoup de chance et de succès.
Que le bon Dieu t’entende ; j’ai plus d’une fois eu envie d’arrêter, car même si c’est un monde dont beaucoup de personnes rêvent, c’est quand même très difficile, il y a énormément de méchanceté parce que les gens ne comprennent pas que la concurrence n’est pas la compétition.
(très émue) cependant, quand je croise les gens avec qui j’échange, puis je constate qu’un brin de mon album est quelques années de leur vie, je me dis que si je dois vivre quelques souffrances pour que certains être humains puissent être heureux et que c’est la seule façon pour moi d’être heureuse, alors je dis merci seigneur. Je te souhaite tout le bonheur du monde dans ton travail, au monde africain, sans vous je n’existerais pas. Merci !