Monique Mbeka Phoba, lumière sur une dame de conviction
Artiste cinéaste, poétesse Afro-belge
Fille de diplomate, Monique est née à Bruxelles. Après une licence en sciences commerciales et internationales à l’Institut d’Etudes Supérieures de Saint-Luc à Bruxelles, elle fait un stage d’initiation à la vidéo documentaire aux Ateliers Varan à Paris, créés par Jean Rouch..
C’est en 1991 que Monique réalise avec Fred Mongu, journaliste de la Télévision nationale zaïroise, Revue en vrac (26 min.) : « Regard sur la naissance de la presse indépendante et pluraliste au Congo ». Suivront plusieurs documentaires qui ont toujours un lien avec l’Afrique (elle a vécu au Bénin plusieurs années et a travaillé pour la télévision béninoise), entre autres :
Rentrer? (1993, 52 min.) ; Deux petits tours et puis s’en vont (1997 – sur les élections présidentielles au Bénin) ; Un rêve d’indépendance(1998, 53 min.) ; Sorcière, la vie (2004, 52 min.) ; Anna From Bénin ; Entre la coupe et l’élection, un long métrage sur la participation de l’équipe nationale (les Léopards) du Zaïre à la Coupe du Monde en 1974. Il a été coréalisé avec Guy Kabeya (2006, “Festival Lagunimages de Cotonou”). ; Tout le monde a des raisons d’en vouloir à sa mère. Sans oublier son plus récent ouvrage cinématographique, Soeur Oyo.
Elle-même artiste de talent, elle s’était attachée à la poésie depuis des années, et déjà, des textes fulgurants avaient été publiés dans des anthologies ponctuelles. Son recueil Yemadja qui paraît aux Éditions Mabiki en 2009 vient confirmer les promesses. Ses activités professionnelles l’avaient amenée à la périphérie du Golfe de Guinée près de Cotonou (Bénin). Dans ce cadre d’enchantements et d’émerveillement, elle a tiré la thématique de la mythologie poétique.
C’est donc à la fois une femme cinéaste et poète qui a réussi à mêler avec brio l’univers enchanteur des strophes aux messages qu’elle cherche à faire passer par ses réalisations cinématographiques.
Je souffle sur ta bouche
Je souffle
Pour que s’expriment
Les mots raidis
Les paroles pourpres
Depuis une vingtaine d’années, documentariste et poétesse, elle évolue dans le milieu culturel belge, entre Bruxelles et Kinshasa. La réalisatrice transforme ainsi son désir de raconter son pays d’origine, la République Démocratique du Congo, avec son dixième film, Sœur Oyo. Déjà auteure de neuf reportages et documentaires qui interrogent les relations entre la RDC et la Belgique, elle signe, cette fois, sa première fiction.
Tourné en août 2013, à Mbanza-Mboma, dans le bas Congo, Soeur oyo relate la vie de petites filles scolarisées dans un pensionnat situé dans le sud-ouest du pays à plusieurs kilomètres de Kinshasa, dans les années 50. La narration épouse le point de vue de Godelive, petite fille solitaire et introvertie qui a bien du mal à trouver sa place auprès de ses camarades. Rencontrant des difficultés à maîtriser la langue française et face aux brimades des autres élèves, elle se réfugie dans un monde de souvenirs. Elle se remémore les moments qu’elle passait avec sa grand-mère, alors qu’elle était encore toute petite.
C’est donc à une grande dame, remarquable autant par le charisme que par son incroyable talent en matière de productions cinématographiques que Brukmer magazine a souhaité mettre sous le feu des projecteurs dans cette rubrique Ô Féminin. La jeune diaspora africaine se plaint assez souvent du manque de modèles, d’exemples de réussites, d’aînés qui puissent leur servir de guide. La jeune diaspora assez souvent repose ses frustrations, parfois certes à raison, sur cette génération qui l’a précédée en l’accusant de n’en avoir pas fait assez pour leur baliser le terrain. Mais aux propos accusateurs, Monique répond avec un flegme qui mêle à la fois sévérité et affabilité : « Faites votre part… » À la jeunesse de suivre les pas de cette femme forte, courageuse et sincère.
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