Colombie : une compagnie pétrolière franco-anglaise finance des paramilitaires
En 1971 est né l’un des projets les plus importants pour l’exploitation des hydrocarbures en Colombie. Elf Aquitaine s’est alors installée en Colombie pour devenir ensuite la multinationale Perenco, filiale du groupe Total. Après quatre décennies dans le pays, l’entreprise est aujourd’hui confrontée ouvertement à des questions sur son soutien financier à des groupes paramilitaires.
L’affaire a pris de l’ampleur le 9 novembre 2011. Ce jour-là, devant un procureur spécial, Vargas Gordillo, ancien membre des Autodéfenses Unis de Casanaré (AUC), sous le commandement d’Hector Buitrago Parada, alias Martin Llanos, a décrit une sombre alliance entre la compagnie et le groupe armé illégal.
Dans sa déclaration, Gordillo a décrit précisément les manières d’agir de son organisation et a signalé qu’il existait trois factions responsables à différents niveaux. L’une était chargée du « nettoyage social » (l’élimination de personnes politiquement gênantes, mais aussi de marginaux), une autre gérait la partie politique (la corruption des élites locales), et la troisième, les finances de l’organisation.
Selon Gordillo : « Des hommes de cette entreprise rencontraient de temps en temps Luis Eduardo Ramirez, alias Commandant HK. Ils nous donnaient de l’essence et 50 à 100 millions de pesos par mois (20 à 40.000 euros) ».
Des témoins morts, muets ou inconnus
HK était membre de l’état-major des Autodéfenses dans le Casanaré. Il est prouvé qu’en mai 2001, celui-ci a été l’auteur de l’enlèvement massif d’au moins 300 personnes dans les plaines orientales. Le 27 décembre 2005, il a été tué par la police.
Vargas Gordillo a expliqué que dans la prison de Combita (Boyacá), un détenu, membre des AUC, connu sous le nom de Joselito Egue Largo, avait des preuves compromettant Perenco. Mais aussi : « Quelques gars sont au courant de tout cela, mais ils ne souhaitent pas parler de peur des représailles. Ces gens finançaient l’organisation et avaient aussi leur mot à dire et un droit de regard sur nos activités » A la fin de l’interrogatoire, il a déclaré que la compagnie pétrolière versait 500.000 pesos (200 euros) pour chaque camion citerne escorté. Il a également indiqué qu’il avait livré un camion transportant des fonds destinés à la contre-guérilla.
Ce n’est pas la première fois que des membres des AUC rapportent des présumées transactions avec Perenco. En Février 2010, les chefs des AUC avait déclaré, devant les procureurs de l’unité Justice et Paix, que la compagnie pétrolière les payait pour la protéger et contrer les menaces de la guérilla sur ses infrastructures.
Daniel Rendon Herrera, alias Don Mario, trafiquant de drogue et comptable du bloc des Centaures des Autodéfenses, a également rapporté des liens avec Perenco. En 2002, Herrera s’est rendu vers les plaines orientales où il a reçu une unité d’au moins 300 hommes. Deux ans plus tard, grâce à diverses sources de financement, cette unité devenait une armée de 3000 combattants. Don Mario, capturé le 15 avril 2009, a expliqué, que entre 2002, lorsque le bloc Centaures a été formé, et 2005, quand les AUC ont pris la décision de se démobiliser, Perenco payait les frais. Il a expliqué qu’en plus de ce financement, l’entreprise leur donnait du carburant pour leurs véhicules, et il a précisé que l’identité des employés de la compagnie qui effectuaient les transaction n’était pas clair pour lui.
Gordillo et Don Mario ne sont pas les seuls à décrire ces liens. Dans une audition conjointe, l’ancien chef militaire Jesus Manuel Pirabán (alias Jorgepirate, accusé d’au moins 200 assassinats), Ramiro Alberto Hernández (alias Policia, responsable logistique du bloc qui avait mandaté Don Mario à recevoir les paiements) et Eiver Vigoya (alias Kangourou), ont tous confirmé le soutien de Perenco.
La fièvre du pétrole en Colombie est élevée et risque encore de prendre de la température. En novembre, 113 nouvelles concessions pétrolières sur une zone de 15 millions d’hectares seront distribuées. 300 investisseurs, dont Perenco, seront présents.
Photographie de Cédric Rutter – Région de Boyaca, pipeline en construction
Cédric Rutter
Source : Brukmer
Colombie Passion
janvier 22, 2012Bonjour,
Encore une des nombreuses affaires que la Colombie possède. Il n’y a qu’à voir par exemple le film « L’affaire coca cola » qui traite du meurtre de nombreux syndicalistes colombiens autour des fabriques d’embouteillage de Coca, basées en Colombie.