INTERVIEW : MENSAH PANOU, LE RÊVE AFRICAIN
Porteur du projet Fifab, Mensah Panou a fait du cinéma africain depuis cinq ans, son cheval de bataille
Dans son édito, Mensah Mathieu Panou, président du Festival International du Film Africain de Belgique pose les jalons de l’événement : » Ce festival a pour objectif de promouvoir et de mettre en avant la culture africaine; particulièrement les productions cinématographiques et audiovisuelles des cultures d’Afrique en direction du public belge, des professionnels distributeurs cinéma, diffuseurs télévision et de permettre aux réseaux associatifs de sensibiliser les cinéphiles et le public potentiel de ces films, afin de leur donner une large visibilité et ainsi leur permettre de se faire une place dans le paysage du cinéma en Belgique ».
Ses faits d’armes
Directeur du Festival International du Film Africain de Belgique ou Fifab, de nationalité belge, est né le 24 Janvier 1976, à Lomé, au Togo. Licencié en arts et spectacles, spécialité organisations d’événements culturels, de l’Université de Paris Sorbonne III, depuis 1996, formation qu’il a complètée en 2000 par une maîtrise en gestion d’entreprises et management à l’université de Cergy-Pontoise et en 2004, par un diplôme de journalisme de l’Institut Pratique du Journalisme de Paris-Dauphine. De 2000 à 2009, il assista Sanvi Panou, comme Directeur général adjoint du cinéma Images d’ailleurs, dans le 5ème arrondissement de Paris et au sein de la structure Orisha production-distribution. Plus spécifiquement, il a eu en charge l’organisation, la programmation et la mise en place du festival annuel Images d’ailleurs, à Paris.
Profondément engagé pour la valorisation du 7ème art africain, le personnage suscite à la fois charisme et simplicité. Rencontre.
Encourager la bravoure des réalisateurs africains
À la lecture de votre biographie liminaire, peut-on dire de vous que vous êtes un visionnaire ? Ou juste un homme engagé.
Je dirai que je suis visionnaire car pour mettre en place un tel projet, il faut avoir une telle vision. Aujourd’hui nous parlons du premier Président africain-américain des États-Unis. Pour parvenir à cette responsabilité, il lui a fallu de la vision. Mais il ne s’est pas arrêté simplement à avoir cette seule vision, il est allé encore plus loin. Il s’est engagé à ce que sa vision devienne une réalité. Voilà. À l’instar de ce grand homme auquel je ne prétends cependant pas me comparer, moi aussi je m’engage au quotidien pour que ma vision devienne réalité. Et pour répondre simplement à votre question, je suis un visionnaire-Engagé .
La réponse est très simple. À mon humble avis, les responsabilités sont partagées car de nos jours les salles de cinéma sont soumises à des normes internationales. Et à partir du moment où les États malheureusement ne veulent pas investir dans les infrastructures mais préfèrent détourner les fonds publics à leur propres profits, les salles de cinéma en Afrique ne peuvent que disparaître.
Face à ça, la société civile. Que fait-elle? Rien du tout! Elle se contente de dvds piratés, de films en streaming sur internet. Peu à peu elle perd ainsi le goût et l’habitude d’aller au cinéma dans une salle appropriée. Elle prend goût et trouve même du confort dans cette situation pourtant affreuse. J’irai même plus loin en relevant une autre problématique.
Si les États réinvestissent à ce jour dans la restauration des salles de cinéma, la société civile les accompagnera -t-elle réellement en portant les films? Je pense que oui. À condition que cette société civile commence par se faire entendre par rapport à cette situation dramatique qu’est la disparition des salles de cinema en Afrique.
Au final, la partition de l’un et l’autre, États comme société civile africaine, pour guérir ce mal ne peut qu’apporter une grande joie dans le coeur des professionnels de tous niveaux confondus du monde du cinéma, dont moi-même en premier.
Quant à la diaspora africaine. Quelle est sa part de responsabilité ?
(Sourire) Loin de moi de jeter des fleurs à la diaspora africain qui fait déjà beaucoup mais peut encore aspirer à mieux. Car ici en Europe, à chaque événement nous voyons cette diaspora répondre présente et bien organisée sur tous les fronts d’une maniéré très engagée. Et ce n’est qu’un début. Elle sera effectivement présente durant tout le festival. Toutefois, pour relever le petit bémol, chaque année cette même diaspora retourne (aux racines) au pays et vit la réalité des salles de cinéma fermées depuis trop longtemps maintenant. Quelles sont donc les actions qui sont menées par la diaspora depuis des années pour sauver les salles de cinéma en Afrique? Je laisserai les réponses à la diaspora et à vos lecteurs.
J’ajouterai quand même pour ma part que j’ai eu à écrire une lettre à certains ambassadeurs africains en 2012 pour épingler la situation, en demandant une audience avec chacun d’entre eux; À ma grande surprise, mes courriers sont restés sans réponse. Mais si entre temps d’autres actions parallèles menées par la diaspora avaient été remarquées, nous aurions peut-être pu voir paraître une lueur de solution.
C’est aussi l’une des raisons qui me ravit. En effet, je suis très content à l’idée de savoir que la plus part des ambassadeurs africains seront présents au Festival International du Film Africain. La part de responsabilité de la diaspora est de continuer de son côté à mettre la pression aux États afin que les salles de cinéma africaines soient réhabilitées.
Rappelez-nous brièvement comment vous est venue l’idée « Fifab » ? Origine et date.
Une question à la quelle je m’attendais depuis, je la croyais m’échapper. Elle est enfin là. En effet, de janvier 2010 à mai 2012, avec mon parcours en tant qu’organisateur de festival à Paris, j’ai fait une petite étude de marché sur les festivals du film africain. Le constat ? Outre nos amis d’Afrikan Films Festival de Leuven qui font un travail remarquable en Flandre, il n’y avait rien à Bruxelles et en Wallonie. Un grand vide et un grand besoin. Alors nous avons juste pensé mettre notre potentiel au profit de cette attente pour combler ce vide. Il faut également savoir que depuis juin 2012, nous avons travaillé d’arrache-pied sans subvention pour avoir la première édition en 2014.
La jeunesse a un rôle clé à jouer
Depuis sa création. Quel bilan tirez-vous à ce jour ?
Plutôt positif. Quand je vois tout ce qui se met en place pour cette deuxième édition, dans dix ans nous serons comparables à d’autres festivals internationaux à l’instar du Festival de Cannes par exemple. Nous nous y attelons. Certes, c’est une grande ambition mais nous nous engageons à tout faire pour la réaliser. Bilan positif, je vous le confirme.
Il reste sûrement beaucoup à faire en Belgique voire en Europe en ce qui concernant la vulgarisation des modèles noirs au cinéma. Là-dessus quels seraient les points cruciaux à mettre en exergue ? Jeunesse, éducation, politique, etc. ?
Je dirai que ces trois domaines sont tout aussi importants. Raison pour laquelle nous impliquons la jeunesse, l’éducation et la politique à différend niveau de ce festival, afin de gravir les échelons de nos objectifs et atteindre nos objectifs en ce qui concerne la vulgarisation des modèles noirs au cinéma.
La réponse peut se résumer en un mot : Communication!
Pour clôturer. Monique Mbeka Pheba, la marraine du Festival. Quel regard portez-vous sur cette illustre dame ?
Source vidéo youtube du média africain de Bruxelles, BIP MEDIA. Entretien réalisé par Ghislain Zobiyo
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