LE FIFAB 2015 TIRE LE RIDEAU
Le dimanche 20 septembre 2015 a scellé la clôture de la 2ème édition du Fifab
Après une première édition mitigée, le Festival International du Film Africain de Belgique est revenu cette année pour frapper un grand coup. Ce n’était plus un coup d’essai. Cette fois-ci, quel coup de maître !
Fifab 2015, acte I
Les lumières de la salle du Théâtre Molière à Ixelles avaient déjà donné la cadence dès vendredi 18 septembre, à l’ouverture de cette deuxième édition. La soirée haute en couleur portée par le symbole de la richesse vestimentaire du Wax que Julie Kabasela, couturière et styliste, nous a fait découvrir par un défilé de ses créations. Les unes toutes aussi magnifiques que les autres.
Avant la projection des deux principaux films de la soirée, on retiendra quelques moments forts des discours de Mensah Mathieu Panou, président du Fifab « J’ai simplement la chair de poule; je me retiens de couler des larmes. Merci à vous d’être venus si nombreux. Sans vous nos efforts pour la promotion du cinéma africain seraient vains » ; Monique Mbeka Phoba, marraine et directrice de la programmation « Le Fifab c’est une fête de culture, d’espoir et surtout de culot »; et Nganji, acteur et photographe qui s’est surtout illustré ce soir-là sur un slam dont le leitmotiv était la persévérance « La peur de ne pas se lancer à la poursuite de ses rêves, la peur de tomber et ne pas pouvoir se relever. Peu importe la peur, il faut se bouger, se relever et continuer d’avancer ».
Les films Nkosi Coiffure et Matongè, quartier africain au coeur de l’Europe ont scellé de la plus belle des façons cette première journée.
Acte II, Nollywood, Afrikan Diaspora Cinema, Swiss Afro Wood : le triomphe de l’excellence africaine
Cette deuxième journée s’est entamée par la projection du récent ouvrage de Monique Mbeka, « Soeur Oyo ». Un film qui suscite entre autres la réflexion sur les différents rapports entre le système colonialiste, l’église catholique et les africains.
L’après-midi a suivi par une série de courts-métrages des productions Afrikan Diaspora Cinema, nouvelle plate-forme belge du cinéma des ressortissants africains. A l’instar de Afrostream ou Netflix, Afrikan Diaspora Cinema ambitionne d’être le nouvel interlocuteur privilégié en Belgique et au-delà du plat pays, en matière de proposition de films payants sur streaming.
Une alternative bien trouvée par son concepteur Thierry Luse qui lui permettra d’avoir son propre modèle économique sans devoir toujours attendre des autres. D’autant plus que les films proposés sur cette plateforme sont d’un intérêt réel et à la portée du portefeuille le plus modeste.
La soirée débuta par un excellent débat modéré par Paulette Jacobs animatrice à Radio Air Libre. Durant 90 minutes, un groupe d’experts du cinéma africain : Guy Kabéa, Monique Mbeka Phoba, Thierry Luse et Tony Akinyemi -représentant Nollywood Europe- ont tour à tour évoqué les points essentiels qui favoriseraient l’essor nouveau du cinéma africain. On retiendra les mots de Tony Akinyemi : « Peu importe à quel point c’est pauvre. C’est la créativité de quelqu’un et il faut la respecter. Comprendre la passion plutôt que l’oeuvre« .
Deux films ont parachevé cette seconde journée : une histoire de mini jupe de Paulin Tadadjeu Dajeu, et Villa Matata de Ronnie Kabuika. Pour l’un ce fut un triomphe ! Pour l’autre, l’adhésion du public se fit longtemps attendre. Mais au final, pour son premier long métrage, Ronnie Kabuika a su apporté du rire et de la drôlerie. Quant à Paulin Tadadjeu, nous reviendrons très bientôt sur ce talentueux réalisateur qui fera parler de lui à coup sûr.
Acte III, souvenirs d’Abéti Masékini sur un air de Tango
L’ultime journée a mis en lumière plusieurs courts métrages. Lula de Ladi Bidinga ; S’il te plaît non de Kis’Keya ; Condamné de Nganji Mutiri ; Nella Mutu de Francisco Luzemo ; Maman de Maïmouna Doucoure et Nkosi Coiffure de Frédérique Migom.
Puis ont suivi deux grands débats. Le premier portant sur la place des femmes d’origine africaine dans le cinéma belge et la diaspora, le second évoquait l’acteur noir absent des écrans blancs. Du premier débat, nous retiendrons l’appel de la comédienne Nadège Ouédraogo : « Il faut recréer la solidarité entre comédiennes africaines ».
Le clap de fin de cette prestigieuse messe du cinéma africain a démarré par la projection du documentaire Abéti Masékini, portrait d’une femme courage, une femme de combat, une femme et une artiste extraordinaire qui aura marqué par son talent de chanteuse, l’Afrique et l’humanité.
Décédée le 24 septembre 1994, une grande dame s’en est allée mais son combat se perpétue par ses oeuvres musicales qui continuent de faire vivre sa mémoire en Afrique et au-delà du continent.
La dernière projection, Tango Negro, les racines africaines du Tango. Un récit poignant qui mène les téléspectateurs en Amérique du Sud, plus précisément en Argentine.
L’on découvre ainsi la véritable origine de cette danse mondiale dont la couleur nègre a depuis longtemps été effacée de son histoire. « Le Tango, c’est l’une des plus grandes richesses que les esclaves africains dans des conditions extrêmement limitées ont légué en Argentine. Pourtant aujourd’hui, à n’importe quel argentin, si tu lui dis que le Tango a des racines africaines, c’est comme si tu l’insultais ».
C’est au terme de ces deux documents cinématographiques d’intense émotion que s’achève la soirée. Le Fifab 2015 tire le rideau en ayant glané avec cette seconde édition de précieux points. Vivement l’an prochain !
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