Inna Modja : Déesse Malienne sous le ciel belge
« On ne peut pas tous correspondre à un standard de beauté en plus complètement obsolète. »
L’artiste internationale malienne Inna Modja était à Bruxelles. L’occasion pour nous de faire connaissance et pour elle de réaffirmer son attachement à la promotion de la culture africaine à travers son œuvre artistique. Inna aborde son style et se positionne dans le mouvement Nappy. Entretien…
Vous êtes belle, talentueuse et connaissez un succès international. Qu’est ce qui vous fait encore rêver?
Je ne pense pas que quelque chose me manque puisqu’on ne peut pas tout avoir en même temps, j’en suis consciente depuis enfant. Je souhaite juste pouvoir m’amuser encore longtemps comme ça, avec la musique, le cinéma, la créativité. j’ai beaucoup d’énergie, mais je garde la tête sur les épaules.
Vous chantez en français, en anglais, en bambara, dans un style assez particulier. Les musiques hip hop et le rap ne manquent-elles pas à vos cordes?
Je rappe en bambara dans mon dernier album. Quand j’ai décidé de revenir à la musique africaine, je me suis dirigé automatiquement vers la musique qui m’a inspirée dans mon adolescence. Le rap notamment et le hip hop qu’on ramène dans notre langue. Ce genre musical a été créé pour parler des thèmes importants de la société et mon album s’y prêtait. Le rap africain, je l’ai découvert avec Daradji, Positive black Soul… Je n’ai pas eu l’occasion de faire du hip hop dans les autres albums, mais je le fais souvent en live.
Quel positionnement par rapport au mouvement Nappy ?
Je me suis défrisé des cheveux deux fois contre l’avis de mes parents, mais je porte cette coupe depuis tellement longtemps. J’ai été vraiment touchée par toute cette polémique autour des cheveux naturels. On ne peut pas tous correspondre à un standard de beauté en plus complètement obsolète. Je viens d’une famille de femmes fortes. J’étais déjà différente de mes copines parce que j’étais très maigres, je n’avais pas de seins, je devais m’habiller en fonction.
Je me suis défrisée des cheveux deux fois contre l’avis de mes parents
On ne peut pas être tous pareils, on ne peut pas être africain, asiatique, oriental, islandais et ressembler au type mannequin qu’on nous met sur le nez depuis longtemps. Je ne me suis jamais posée la question, j’ai les cheveux comme ça depuis très longtemps. J’étais égérie pour L’oréal pendant 4 ans pour mes cheveux et il y a pas mal de mamans qui me disaient que leurs filles acceptent mieux leurs cheveux depuis qu’elles me voient. Quand j’étais gamine, et je venais en Europe, les enfants de mon âge se moquaient de moi à cause de mes cheveux et me traitaient de blédarde. Les choses changent, on apprend à s’accepter tel qu’on est, et je dis tant mieux pour le mouvement Nappy…
Votre regard sur la situation au Mali
Tant qu’il y aura des gens opprimés dans le nord du Mali, tant que la zone sera dangereuse et inaccessible à cause du terrorisme, je ne dirai pas que la situation est réglée.
Un mot sur la « Bamako connection »
Ce que je souhaite, ce n’est pas que les gens me ressemblent, mais que les gens embrassent la culture africaine, la mode, le wax ! Je promeus tout ceci via le projet « Bamako connetion » qui regroupe toutes les connections qui se retrouvent à Bamako à travers la musique, la mode, la photographie… Il se passe des trucs magiques à Bamako.
Qui vous inspire ? quels artistes écoutez-vous en ce moment?
En ce moment j’écoute Calipso Rose, je suis fan, j’écoute en boucle. Dans mon esprit, Diana Ross, Miriame Makéba et Oumou Sangaré sont des marraines qui m’inspirent.
Quel destin vous souhaiter ?
Très tôt, mes parents m’ont dit que mon destin était lié à moi, à ce que j’allais faire de ma vie. Je n’étais pas destinée à avoir cette carrière, c’est beaucoup de chance et beaucoup de travail surtout, je sais d’où je viens, je sais que je suis partie de zéro, j’ai tout à gagner, mais je peux aussi tout perdre, je dois continuer à travailler.
Ammouna Pour Brukmer Magazine