Persona non grata en RDC, Maria Arena s’exprime sur la crise politique actuelle
« Une quarantaine de fosses communes ont été trouvées, les populations sont déplacées, des milliers d’enfants sous risque de famine. Nous ne pouvons pas accepter ce qui s’y passe. »
7 personnalités Belges sont sous la ménace d’une interdiction de visa pour la République démocratique du Congo ainsi qu’un gel des avoirs; a annoncé le gouvernement Kabila qui leur repproche soit un soutien à l’opposition et aux sanctions contre le régime congolais, soit leurs critiques de la situation dans le pays. Afin de nous éclairer sur cette mesure et sur la situation générale, nous sommes allé à la rencontre de la député Européenne Maria Aréna, visée par la mesure. Membre de l’assemblée parlementaire ACP-UE, l’ancienne ministre belge est très impliquée dans le processus de négociation en RDC et au Burundi.
Qu’est ce que cela fait d’être Persona non grata en RDC?
je ne comprends pas la réaction des autorités de la RDC. L’objectif de l’UE était simplement de demander au gouvernement de RDC de respecter sa constitution. Pourquoi l’UE est-elle en droit de le faire? parce que depuis janvier 2016 la situation en RDC se dégrade. Il y a des mouvements democratiques qui revendiquent le respect de la constitution et un processus électoral. Pas mal de personnes se sont retrouvées en prison ou décédées lors des manifestations. Etant donné cette situation, l’Union Européenne et le parlement ont pris des positions pour eviter un embrasement. Ce n’est pas un problème centré sur Joseph Kabila, c’est une question de respect de la constitution. Il y a eu un premier volet de sanctions ciblées sur des personnes présumées coupables de violation des droits de l’homme dans certaines régions. l’armée aurait joué un rôle aussi dans ces crimes et des sanctions ont été demandé pour 9 personnes. Cette demande a été faite par le parlement européen, par les USA et les nations unis. L’union africaine n’etait pas contre. Nous espérions que le gouvernemant kabila donne des messages positifs pour aller vers le processus electoral. L’accord de la saint sylvestre était de bonne augure. Nous avions pensé que l’accord etait de nature à aller vers l’enclenchement du processus electoral. Seulement, après la mort de Tsisekedi, on a vu qu’il y avait des volontés manifestes de ne pas respecter cet accord. On etait sensé être dans la transition et cela demandait des mesures exceptionnelles. Les choses n’ont pas avancé, au contraire on a assisté à un enlisement de la situation au kasai, une quarantaine de fosses communes ont été trouvées, les populations sont déplacées, des milliers d’enfants sous risque de famine. Nous ne pouvons pas accepter ce qui s’y passe.
Au nom de quoi l’Europe s’implique autant dans cette situation congolaise?
L’Europe est le premier donateur en RDC, et un partenaire dans le cadre des accords de Cotonou. Nous voulons juste des messages clairs de l’etat congolais, qu’ils respectent les accords de la st sylvestre en protegeant la population civile.
Pour quelle raison le gouvernement Kabila tuerait sa propre population?
L’instabilité en RDC donne raison au gouvernement pour rester en place. Quand un pays est instable, les gens au gouvernement pensent qu’il est nécessaire de rester pour éviter le chaos qui pourrait être généré par le processus électoral. Donc les instabilités peuvent servir une majorité actuelle pour « garantir l’ordre dans le pays » . Je ne dis pas que les assassinats sont pilotés par le gouvernement et sa majorité, mais quand il n’y a plus de chaîne de commandement qui fonctionne, c’est le chaos et l’instabilité politique peut générer l’instabilité securitaire et alimentaire. L’un ou l’autre est nuisible pour les populations. Moi je ne prends pas partie pour un clan ou pour un autre. Si demain, par les elections, la majorité de kabila emporte, alors tant mieux pour elle. La chose importante est le respect de la constitution qui dit qu’il ne peut plus se représenter. Mais il n’y a pas qu’un seul homme en RDC, il peut très bien passer la main à quelqu’un d’autre tout en restant dans une même majorité. C’est aux congolais d’en décider.
Le discours de l’Europe n’est-il pas dissonant par rapport à celui de la Belgique?
Non la Belgique a pris des positions claires au niveau du conseil; ils ont soutenu les sanctions ciblées, il n’y a qu’une seule voix au niveau européen par rapport à la situation en RDC.
Avez-vous des avoirs au congo?
Non je n’ai rien du tout au Congo. Je suis menacée de sanctions, mais moi je n’ai aucun problème, je suis en securité ici. Pour les visas c’est dommage, mais moi je ne suis pas en danger, par contre les populations et les mouvements democratiques portés par des individus congolais ne sont pas en securité.
Jusqu’où peut aller l’Europe?
Nous sommes prêt à aider au respect des accords de la saint sylvestre et voir aider au processus electoral, puis aider la population par le billet de l’aide au developpement.
On évoquait pourtant des sanction au niveau de l’aide au developpement!?
je suis personnellement opposée au fait qu’on parle dans la resolution de l’activation de l’article 96 de l’accord de cotonou. l’UE a pris des sanctions de levée de l’aide budgetaire au developpement au Burundi parceque le gouvernement utilisait cette aide à des fins militaires pour tuer les populations. Nous ne pouvions pas soutenir ces actions. Nous avons orienté ces aides autrement via des ONG qui c’est vrai, ont du mal à travailler surplace car le gouvernement exclu ces ONG. Au Congo, je ne veux pas envisager le pire et je refuse l’activation de cet article, pour envoyer un message d’ouverture de dialogue et il est possible de discuter ensemble de la crise de manière responsable. j’ai été vraiment étonnée des mesures annoncées contre nous, car nous avons reçu le ministre des PME congolais envoyé par Kabila pour nous expliquer la situation. Je lui ai donné la version de la resolution que nous allions voté et il a compris l’etat d’esprit dans lequel nous sommes. Nous lui avions manifesté notre envie de voir respecter les accords de la saint sylvestre.
Quid du Burundi?
J’étais à Malte dans le cadre de l’assemblée interparlementaire ACP et nous avons rencontré les représentants de l’Etat Burundais. Malgré de belles avancées dans bcp de dossiers, la question du Burundi n’a elle malheureusement pas fait l’objet de consensus. J’espère qu’on pourra rapidement avancer car la situation est dramatique et urgente. Nkurunziza n’a pas donné de signaux positifs, l’article 96 reste activé, les pourparlers n’ont pas donné lieu à une levée des sanctions.
La turquie se positionne pour renforcer l’aide au Burundi
Ce n’est pas très etonnant, je pense que Erdogan n’a pas fait preuve d’un grand soutien à la democratie… si il soutenait un dictateur, je ne serai pas très étonnée.
La position de l’Union africaine?
J’espère que l’UA donnera une position claire en RDC car il y va de la stablilité de toute la region. Il y a 1 million de déplacés qui se dirigent en Angola. L’UA a des responsabilités évidentes concernant la situation au Congo.
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