La montée en puissance de l’art africain
À l’aube de l’an 2000, les expressions culturelles afrodescendantes, et l’art contemporain en particulier, sont montées en puissance sur la scène créative mondiale, lui donnant un nouveau souffle d’inspiration croissant, exponentiel.
Si l’art africain a de tout temps fasciné les collectionneurs, il est longtemps resté figé dans des codes de lecture dictés par l’Occident se concentrant sur l’art tribal, « l’art premier » venant d’Afrique, un continent faisant l’objet à la fois de fantasmes et de convoitises. Mais, fort heureusement, les lignes ont bougé.
« Que nous le voulions ou non, l’Afrique fait désormais partie de la mémoire collective du monde. Une mémoire oublieuse, arrogante et méprisante parfois, mais au sein de laquelle l’Afrique constitue une incontournable réalité »
Simon Njami, curateur majeur et fin connaisseur.
Les identités s’entremêlent, les visions du monde évoluent à la vitesse de l’ère digitale, les lieux d’expression se multiplient et le marché explose. À l’heure du débat passionné sur la restitution du patrimoine, lors de la dixième vente aux enchères de la maison PIASA à Paris en novembre dernier, une toile d’un jeune artiste camerounais, Marc Padeu, estimée entre 5000 et 8000 euros, a été adjugée à 195 000 Euro !
Quelques rendez-vous mondiaux sont désormais devenus incontournables
Dans l’agenda des amateurs (1:54 à Londres et Marrakech, AKAA – Also Know as Africa à Paris, Dak’Art…) et des événements majeurs tels que « Africa Remix » en 2005 à Beaubourg (Paris) ont contribué à booster cette impressionnante évolution.
L’évènement « AKAA« – (Also Known as Africa) Pour sa 3e édition, cette foire d’art contemporain a connu, à Paris début novembre 2019, une affluence record avec 16 000 visiteurs venus découvrir le travail de plus de 130 artistes présentés par une cinquantaine de galeries et d’exposants. Ce rendez-vous majeur propose de voir l’Afrique autrement à travers la vivacité de sa création contemporaine en décloisonnant les catégories et les géographies
Avec Geo-Graphics au Bozar en 2010, la commissaire Koyo Kouoh et son équipe proposait une confrontation inédite entre arts africains traditionnels au centre de l’espace et art contemporain sur les cimaises dont un important travail sur les villes africaines, miroirs du monde moderne réalisé par l’architecte ghanéen David Adjaye.
L’exposition « IncarNations – African Art as a Philosophy » présentée l’été 2019à Bozar a ébloui le public bruxellois par sa puissance et sa scénographie. Inspiré de l’essai éponyme du philosophe Souleymane Bachir Diagne, « IncarNations » va encore plus loin dans la confrontation des époques. Le regretté Sindika Dokolo, entrepreneur et collectionneur, et son complice sud-africain Kendell Geers brisent les frontières entre art premier et art contemporain et ne souhaitent plus y voir qu’un « art puissant ». En mêlant aux plus belles pièces anciennes, des œuvres contemporaines de « talentueux ténors » tels que Yinka Shonibare ou William Kentridge et en y intégrant d’impressionnantes photographies et installations vidéo, cette exposition unique est didactique et apporte une nouvelle lecture conjuguée de l’art, dans son intemporalité. Au-delà la restitution, ce nouveau regard constitue une réappropriation majeure de l’art africain par des fils du continent qui invite à se regarder autrement qu’à travers le regard de « l’autre ».
À l’image de l’Angola où la Fondation Sindika Dokolo abat un travail considérable, des résidences et des lieux de création et de diffusion se multiplient sur le continent en dépit d’un désintérêt relatif ou absolu des pouvoirs publics locaux. La capitale sénégalaise n’est pas en reste puisqu’elle accueillera dès que les conditions sanitaires le permettront, la 14e édition de sa Biennale d’art contemporain, DAK’ART.
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